Steve Jobs et l’échec

Cette interview de Steve Jobs n’est pas la plus connue, sauf peut-être des amateurs de développement personnel ou de management. Elle est extraite du journal de 20H d’Antenne 2, diffusé le 7 avril 1984, que l’on trouve sur le site de l’INA. « Il a vingt-neuf ans, et son nom appartient déjà à la légende dorée des réussites économiques américaines », le présentait alors Christine Ockrent, rappelant que le président François Mitterrand l’avait rencontré en Californie. La France se prêtait-elle à l’époque à des réussites économiques comme la sienne ? Voici sa réponse.

Il semble qu’en Europe la recherche soit d’un bon niveau. Mais les faiblesses viennent des applications concrètes, une étape qui est, en elle-même, une source d’innovation. Cela, je pense, vient d’un manque de sociétés prêtes à risquer pour entreprendre. Ce que nous appelons le « développement », c’est rarement les grandes entreprises qui le font, c’est plus les petites ou les moyennes entreprises.

Alors, ce qu’il faut, c’est beaucoup de petites entreprises avec des étudiants doués, des capitaux à risque, plus efficaces entre les mains du secteur privé, et aussi des champions que l’on prenne pour modèles en disant : « L’innovation, c’est ça ».

Mais il y quelque chose de plus subtil, c’est le facteur culturel. En Europe, l’échec, c’est très grave. Si, en sortant de l’université, vous loupez votre coup, cela vous suit toute votre vie. Alors qu’en Amérique, à Silicon Valley, on passe son temps à échouer ! Quand on se casse la figure, on se relève et on recommence.

Ce qu’il faut pour que l’industrie informatique se développe en Europe, et en France, c’est une solide industrie du logiciel. Parce que le logiciel, c’est le pétrole des années 80 et 90 de cette révolution informatique. Il faut des centaines de mini-entreprises de logiciels, et la France pourrait dominer l’Europe dans le logiciel. Elle a les étudiants les plus brillants, une bonne maîtrise de la technologie. Ce que nous devons faire, c’est encourager les jeunes à créer des sociétés de logiciel. Nous, nous ne voulons pas mettre la main dessus. Le gouvernement ne doit pas non plus tenter de le faire. Elles doivent appartenir à ceux qui prennent des risques.

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